about
Je peine depuis l’année dernière sur le fameux Finnegans Wake. Pourtant, des montagnes littéraires, j’en ai gravi, et souvent les doigts dans le nez. Proust, Mann, Dostoïevski, Nietzsche, Musso, la poésie, la philosophie, l’histoire du football, rien n’échappe à mon appétit dantesque, yep, je pense que j’ai lu tous les meilleurs livres de la terre, Joseph B. alias « la bibliothèque vivante », mais là, nom d’un chien, je cale : je m’emmerde grave.
Oui, il y a de la sonorité et du rythme, oui c’est riche en références et en clins d’œil, oui ça palpite, ça virevolte, ça éclate, mais je n’y vois qu’esbroufe et, de la part des thuriféraires de cette œuvre alambiquée, une seconde couche d’esbroufe, en mode « seuls les meilleurs savent ».
Dans ces cas-là, on fait quoi ? On se met en pause (j’en suis malgré tout au chapitre huit) et, par vengeance avisée, on malmène l’impudent auteur de cette torture syntaxique (pas moi, Joyce), en le pillant sans vergogne.
Privé d’inspiration (car privé d’existence), je peinais à poser des mots sur un instrumental séduisant que Gildas m’avait envoyé en octobre 2020 ; impossible de trouver un angle intéressant, tant je n’avais rien à dire, alors j’ai imbriqué des extraits de Finnegans Wake dans mon persistant ressenti de renoncement. Ainsi est né le texte de « Des articulés », partant d’une œuvre mythique pour aboutir à des constats désabusés formulés par un individu lambda.
J’ai chanté sans réfléchir, en première intention, pensant que j’allais plus tard refaire au propre mes prises de voix (ce qui arrive rarement), j’ai ajouté quelques couches de guitares et renvoyé le tout à Gildas, qui allait triturer cette matière brute dans un mix qui prendrait au fil du temps une ampleur inattendue, au point d’en faire une de mes chansons préférées de Centredumonde, du genre de celles que je suis incapable de composer et que je fredonne le matin en allant au bureau.
Oui, je fredonne ma propre musique, mais c’est aussi la seule que j’écoute.
Bon, je mens, dans ma liste de chansons murmurées le matin sur le chemin du bureau, on retrouve : « (And to think it all started with) Trim milk » (Chris Knox), « No mano mayé » (les trois Moldaves qui gigotent sur l’avion), « Balance ton quoi » (la nouvelle Lorie belge), « Ave Maria » et la sonnerie de réveil de mon téléphone portable.
Je me demande bien pourquoi devant la machine à café je m’étonne, jour après jour, d’être d’humeur inégale.
lyrics
Quelle belle romance!
Marionnettes de la nuit,
Antiques, authentiques
Ni fleurs, ni couronnes!
Nous accomplissons l’enfer
Nous l’avons transmis, mes frères
En avant!
Corps!
Vieux corps de Centredumonde
Rien qu’un instant
Dans l’idéal,
L’horizon vertical
Se prolonge
Sur les plages
Arrières des corbillards
Les corbeaux débrouillards
Grattent la terre
Et mettent à jour nos déboires
Les coups de cœur enfouis
Et en fuite!
Je ne veux pas sombrer
Je refuse de rêver
Je t’attends
Désarticulé
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